Achevé
le 14 mars 2014
L'expérience
Oregon
de Keith Scribner
roman
américain, 2011 (éd.10/18), 496p.
« Mon
Dieu ! Et s'ils y restaient si longtemps que ça ? (…)
Leurs gosses grandiraient pleins de confiance, « purs
produits » de l'Oregon. Ils feraient partie de l'organisation
de la jeunesse du ministère de l'agriculture. On viendrait chercher
sa fille dans des pick-up rutilants. Un fils étudiants en agronomie
et inscrit au club de tir du lycée. Ou ils s'installeraient dans une
communauté dans les collines –
leur fils passerait sa vie à jongler et à coudre des clochettes
sur son chapeau de bouffon en velours flapi, leur fille à adorer la
lune et à faire de la peinture avec le sang de ses règles.
» (p.99)
Lorsqu'elle
emménage avec son universitaire de mari en Oregon, Naomi fait la
gueule : elle a perdu son sens de l'odorat or elle est nez de
profession. Quand elle retrouve enfin son odorat au contact de ces
senteurs nouvelles et si exotiques pour la New new-yorkaise qu'elle
est – le plus souvent subtil mélange de patchouli, muffin au
carottes et aisselles, Naomi fait la gueule de plus belle :
décidément, c'est à New York qu'elle veut vivre. Quand nait son
enfant, si attendu, c'est encore et toujours la gueule :
problèmes d'allaitements cette fois... Bref, ce n'est pas dans son
intrigue, ni dans son personnage principal qu'il faut chercher
l'intérêt de ce roman.
En
revanche, le personnage de Clay, jeune anarchiste avide d'amour et
passionné par le dynamitage de 4×4 ou encore de Séquoïa,
écolo-alter-mondialiste-sécessionniste et mère-courage
célibataire, sont plus attachants : ils nous racontent une
Amérique que nous ne connaissons pas. Celle qui s'est faite dans
l'ombre du rêve américain, celle de tous ces gens pour qui
ascension sociale et possessions matérielles ne constituent pas un
idéal de vie. Ces gens qui trouvent les Etats Unis trop grands. Qui
rêvent de connaître leurs voisins, de vivre sans les géants de
l'agro-alimentaire ou les laboratoires pharmaceutiques, qui aiment
les arbres et les légumes du jardin. Et qui sont prêts à se battre
pour leurs valeurs. L'expérience Oregon nous raconte une Amérique à
l'opposée de celle des traders ou des obèses gorgés de bic-macs,
et nos clichés sur les Américains en prennent un coup. Tant mieux.
Anaïs T.
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